Monsieur le président de la République :
Le peuple du M’zab s’adresse, à travers la présente, à vous directement, comme ultime recours, en votre qualité de garant de l’unité nationale, de défenseur de la République.
I- Des faits
Il ne vous échappe pas, Monsieur le Président, que le M’zab meurtri au cœur de l’Algérie, sombre de jour en jour dans le chaos de la terreur et la mort. Après les raids escortés et les agressions collectives, Ghardaïa vie quotidiennement et dans l’impunité totale au rythme des attaques assassines sur les individus. La communauté mozabite établit régulièrement et à des jours fatidiques le décompte macabre : il y a mort d’hommes, des jeunes et moins jeunes emportés à l’aube et au matin de leur vie, torturés, mutilés et massacrés dans notre Algérie d’aujourd’hui parce qu’ils sont MOZABITES! Au courant de ce mois sacré du Ramadhan, deux assassinats sont adjoints aux huit autres enregistrés au fil des huit mois écoulés, avec tentative cette fois-ci de les déguiser à la hâte en simples accidents de circulation par les représentants de la république à Ghardaïa, vos représentants Monsieur le Président. Face à la honteuse impuissance, le recours aux subterfuges est dès lors permis.
Cette tentative de déformation des faits a vexé les jeunes mozabites qui se voient doublement humiliés, par l’assassinat des leurs d’une part et la dissimulation des causses par les autorités d’autre part. Ceci appelle inévitablement la colère et la révolte.
La ville de Ghardaïa est ainsi plongée durant les jours et nuits de ce mois sacré dans la pagaille des escarmouches entre jeunes mozabites et les forces de gendarmerie qui se sont associés bizarrement aux agresseurs pour commettre ensemble les pires atrocités.
La communauté mozabite est irrésistiblement poussée vers le crime et la revanche meurtrière; jusqu’à présent elle s’en est fortement et fermement défendue. Elle résiste contre la tentation satanique; continue à contenir ses blessures, ses larmes, et ses souffrances, croyant fermement en ses principes irrigués de l’Islam de tolérance, de sa morale et sa civilisation. Nous vivons au XXI nième siècle, dans notre ALGERIE pour laquelle nous nous sommes tant sacrifiés, dans notre République où SEULE LA LOI devrait primer, et nous souhaitons de continuer à y croire.
Monsieur le président de la République : C’est sous votre haute magistrature que les mozabites ont été profondément offensés voyant leur mémoire collective sauvagement profanée, les assassinats et les massacres s’enfiler. Ils se murent dans leurs positions d’autodéfense durant huit longs mois déjà.
Où est notre République ? Où sont les Institutions de la République pour y mettre un holà !
L’impressionnante armada des forces de sécurité déployées dans la vallée du M’zab est en nette disproportion avec l’espace, le nombre de la population et les configurations du terrain à sécuriser. Et pourtant la tragédie continue. Il y a manipulation des forces de sécurité en place à Ghardaïa, ressentie par l’inefficience douteuse des troupes et la partialité flagrante des commandements successifs. Ces forces agissent en sens unidirectionnel dans tous les cas et circonstances. Leurs approches sécuritaires sont basées sur des apriorismes ethniques éculés. Leurs bases de données sont faussées. Les plans sécuritaires visiblement entachés par les stigmates des accointements se succèdent sans résultats. Les assassinats se multiplient. Les échecs sont consommés et les responsabilités localement et à haut niveau ne sont pas assumées. Les doléances et les préoccupations sécuritaires des citoyens et de leurs crédibles représentants ne sont pas prises en compte. Cette gestion chaotique de ce volet relève à notre sens beaucoup plus de la duplicité volontaire à dessein inavoué que d’une absence d’expérience de gestion de ‘’conflits supposés communautaires’’.
Nous vous confirmons de nouveau avec toute la solennité exigée qu’au M’zab la problématique des événements qui s’y déroulent relève fondamentalement de l’absence d’autorité des Institutions de la République, de l’impunité qui s’érige en système de gouvernance, et de la volonté affichée par le gouvernement en place de jouer le rôle d’un douteux arbitrage entre les deux communautés, relevant d’une neutralité coupable, cherchant un virtuel équilibrisme qui enfonce davantage le M’zab dans les dédales honteux du communautarisme primitif. C’est une logique qui conforte les clans manipulateurs à tous les niveaux. Elle pousse aux extrémismes; au détriment des forces de la paix. Nous n’écartons pas la bonne foi et la possible méconnaissance des profondes réalités sociologiques et historico-culturelles de la région, mais au vu de la durée et l’ampleur de la crise, les correctifs et les réajustements devaient être à l’ordre du jour depuis longtemps.
II- Des doléances :
Monsieur le président de la République : vous êtes solennellement interpellé pour faire appliquer une autre politique conforme à votre haut et respectable statut de Président de tous les Algériens : Faire appliquer rigoureusement l’article 24 de la Constitution qui stipule que « l’Etat est responsable de la sécurité des personnes et des biens». Faire appliquer les lois de la République et faire sortir les institutions de l’Etat du bourbier communautaire dans lequel les clans manipulateurs veulent les contenir pour faire perdurer la crise.
Monsieur le Président : les citoyens du M’zab vivant au quotidien la terreur, le déracinement, l’impossibilité ‘’admise’’ (surtout aux yeux des autorités) de retourner vivre ou exploiter de nouveau leurs biens à usage d’habitation ou à usage commercial ou agricole situés dans « des territoires libérés », et le terrorisme meurtrier les ciblant spécifiquement avec des complicités criardes, se considèrent de facto exclus des dispositions pertinentes de l’article 29 de la Constitution de notre République qui stipule : « Les citoyens sont égaux devant la loi, sans que puisse prévaloir aucune discrimination pour cause de naissance, de race, de sexe, d’opinion ou de toute autre condition ou circonstance personnelle ou sociale.» Votre responsabilité historique est d’une extrême pertinence! Evitons les dérapages irrémédiables!
Les Algériens du M’zab interpellent votre conscience et votre patriotisme salvateur et attendent respectueusement de vous et dans l’urgence que dicte l’impérieuse nécessité, des mesures concrètes pour arrêter l’effusion de sang et rétablir la PAIX JUSTE.
La paix ne se décrète pas sur le dos d’une communauté, au détriment de ses droits élémentaires à l’existence, et à la reconnaissance de ses acquis civilisationnels, fierté de l’Algérie et patrimoine commun, généreusement offert et en toute humilité à tout le peuple Algérien.
Les citoyens du M’zab et tous leurs représentants se tiennent à la disposition de la République pour apporter toutes leurs contributions et vous assurent de leurs engagements.
Avec tout notre profond respect notre Président.
Pour le CCS Pour le Groupe de Cadres
Bahmed BABA OUMOUSSA Noureddine DADDI NOUNOU
Khodir BABAZ Slimane El ALOUANI
Baba CHEKEBKEB Slimane GUEZOUL
Dr Salah MEHARZI